Tous les jours, ou presque, je me regarde dans la glace. Je vois l'homme à
la surface. Dès fois beau, dès fois vieux con, souvent mal rasé.
Mais toujours je vois comme les années me vont bien. C'est quelque chose
qui m'a toujours fasciné, cette faculté que tout un chacun, quel qu’il soit, a
de se croire beau pour les autres et bien-sûr pour lui-même.
Et pourtant, indéniablement, nous sommes moches. J’en veux pour preuve mon
cas. Pourquoi quand j'aborde cette dame dans la rue, elle me rejette. Juste après
un mot ? Un seul mot ! Pas même vulgaire ! Et cet homme comme
moi, pour ainsi dire, seul dans cette file d'attente qui n'ose me regarder et
fuit du regard un simple échange amical.
Bien-sûr que tout se joue sur la beauté, dans le regard des autres et puis
un peu sur ce que l'on dégage. Il est bien difficile chaque jour d’être
présentable et de coller aux codes pour plaire, alors qu’à l’intérieur, en tout
instant, l’envie de donner le plus beau de soi est présent.
Pourtant un jour j'ai dû me ranger à l'évidence. Un jour j'ai pu voir l'être
sous la couche extérieure. J'étais tranquille dans la rue, je flânais, je
prenais le temps. Et je me suis arrêté devant cette vitrine, face à ce costume,
ma tête se reflétait juste au-dessus. Et j'ai vu l’être sous la carapace.
Mon mode de vie est le fruit de mes limites et non de mon être.
Je suis beau, c’est vrai. Je suis beau de ce qui est en moi.