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Dernières nouvelles...

* Je mets mon roman "Tratinium" en ligne sur amazon. Vous pouvez ajouter vos commentaires ici (et voir plus bas), j'y répondrais :)

mardi 18 décembre 2012

Petits jeux de lettres


"Un peu de jalousie éveille un amour heureux qui s'endort." (Mme Deshoulières)
Upetit défaut juvénile entraîne une attitude
hébétée qui souvent énerve.

"La simplicité est la sophistication suprême." (Léonard de Vinci)
Larges sourires emportent longues souffrances silencieuses.

"Je résiste à tout sauf à la tentation." (Oscar Wilde)
Juillet reviendra avec toutes ses allures lentement torrides.

"Hâtons-nous de succomber à la tentation avant qu'elle ne s'éloigne." (Epicure)
Hantez nos demeures sans apporter les terribles
affres qui enterreront nos secrets éternels.

"Après les affres de la mort, elle ressentit toutes les horreurs de l'enfer." (Jacques Bénigne Bossuet)
Arrêtez l'âpre descente lugubre. Mentir entraîne 
rejet, tourment, lésion... Honneur dans l'effort !

Prochainement :
"The future depends on what we do in the present." (Mahatma Gandhi)

vendredi 16 novembre 2012

The belles-mères party

C'est une histoire de mafieux ou alors de belles-mères. A vous de voir si vous voulez voir la vidéo ou lire le texte...




Deux hommes, avec des airs de gangster, de chaque côté de la scène. A tour de rôle chacun va faire un pas vers l’autre. Ils ont l’accent de la Sicile.

LÉON. – Cet après-midi on retrouve le gros Tony au parc pour l’échange des sacoches.

DOMINIQUE. – A quelle heure ?

LÉON. – Juste avant la pause cappuccino, à 15h45!

DOMINIQUE. – Et on lui dit quoi ?

LÉON. – On lui dit rien… on échange les sacoches.

DOMINIQUE, en sortant son arme. – Et s’il refuse…

LÉON. – Il ne refusera pas puisque on est en deal avec lui.

DOMINIQUE. – Ouai… mais s’il y a un maquereau qui vient s’en mêler, on le fume !

LÉON. – Ce serait un âne de se frotter à nous. Tant pis pour lui, il se fera avoiner –hé-hé-.

DOMINIQUE. – Et si c’est des poulets, on les grille.

LÉON. – Enfin, s’il y en a, on les laissera gambader, moi, je les préfère sans plomb.

DOMINIQUE. – Ou alors, flambé au colza, c’est plus écologique…

LÉON. – Mais non, on ne touche pas aux gallinacés. On ne les regarde même pas. Sinon le petit parrain français –hé- va nous pondre une loi de là-haut –oh !-.

DOMINIQUE. – Mais nous on ne comprend que la loi du milieu.

LÉON. – On a le respect de la famille… Et on « écoute » la parole de nos aînés.

LÉON. – Et on « répond » à l’appel du ventre… (En faisant « parler » son ventre.) Gratin dauphinois !

LÉON. – Escalope de veaux !

DOMINIQUE. – A table !

LÉON. – Viens manger, dépêche toi !

DOMINIQUE. – Tagliatelles à la carbonara !

LÉON. – Houa ! Les dernières tagliatelles à la carbonara de « ma belle-mère » ! (Avec un air écoeuré.) Mémorables !

DOMINIQUE. – Mamma mia ! Parfumées et juteuses. Magnifique !

LÉON. – Oui, enfin, c’est surtout des oignons et de la crème. Comme « ma belle-mère » !

DOMINIQUE. – Comment ça ?

LÉON. – Et bien oui, odorante et pleine de graisse !

DOMINIQUE, s’avançant vers Léon. – « Ta » belle-mère sent l’oignon et baigne dans le gras ? T’en as de la chance, toi, la mienne est tellement squelettique qu’elle me coupe l’appétit quand elle me sert ses pâtes bolognaises en boîte.

LÉON. – Parce que tu sais faire la sauce, toi ? En plus elle vient de là-bas, dit ! Le goût de l’Italie ! Je voudrais bien te voir transportant toutes ces boîtes depuis le pays.

DOMINIQUE. – Arrête donc, elle les transporte en voiture… En plus, elles ne doivent pas être bonnes pour se faire vomir comme elle le fait !

LÉON, s’avançant vers Dominique. – Comme tu parles de « ta belle-mère » ! Les boîtes, c’est diététique ! Au moins elle ne passe pas toute la journée à les digérer comme « ma belle-mère ». Il faut la voir prendre sa langue pour un cure-dent. Slurp ! A croire que sa dent creuse, c’est un garde-manger.

DOMINIQUE, s’avançant vers Léon. – Et bien oui, c’est des manies de vieux. Parce que tu crois qu’avec le petit cul qu’elle a « ma » belle-mère, elle se gêne pour péter à table…

LÉON. – Quoi ?!...

DOMINIQUE. – … sans donner d’excuse, à croire qu’elle est sourde !

LÉON, s’avançant vers Dominique. – Eh dit donc, ça suffit ! Tu ne parles pas de ma mère comme ça ! On ne t’a pas appris, dans ta famille, à tourner la langue dans ta bouche avant de raconter !

DOMINIQUE. – Eh ! Toi aussi t’as descendu ma mère ! Parce que tu crois que ça fait plaisir d’entendre sa mère traitée de soupière ? Au moins, elle sait faire la cuisine ! Ce n’est pas comme la tienne qui prend une balance pour vous servir et qui se sape au rayon Barbie !

LÉON. – Et la tienne prend les assiettes pour des auges ! Telle mamma, tel petit… Heureusement qu’ils ne sont pas tous comme ça dans ta famille !

DOMINIQUE. – T’as vu ma mère ! Et dans 30 ans, tu crois que ma sœur va ressembler à qui !

Ils mettent tous deux la mains sur leur flingue.

NOIR. Les deux truands sortent leur arme et se mettent en joue.

LUMIÈRE. Les deux truands prennent un temps de réflexion. Puis, sans accent…

LÉON. – Ce n’est peut-être pas assez pêchu, qu’est ce que tu en dis ?

DOMINIQUE. – Non ça va. (Il reprend ses esprits.) J’ai même failli sortir du jeu avec l’histoire des belles-mères. (Il a un grand et large sourire forcé.)

LÉON. – Ah bon ? Et pour l’accent ? Je ne suis pas trop sûr…

DOMINIQUE. – Non ça va. (Ils vont pour sortir par le fond de scène. Dominique s’arrête et pointe Léon de son arme.) Dit donc ! Tu penses vraiment ce que tu as dit… sur ma mère ?

NOIR. Bruit de coup de feu.

mardi 6 novembre 2012

Les aventures de Suzette


Suzette est une petite fille espiègle. Ses histoires sont inspirées des fables de La Fontaine. Les personnages réels remplacent donc les animaux. Les différentes histoires sont jouées dans le cadre familial, à l’intérieur d’une maison de village. 

Les personnages :
  • Papa, le père, gourmand, travailleur mais pantouflard. 
  • Maman, la mère, tendre, calme, joyeuse. 
  • Suzette, la fille, 10 ans, espiègle, toujours partante et volontaire. 
  • Mamie, la grand-mère, dynamique, généreuse. 
  • Pépé, un voisin plaintif. 
Chaque histoire est indépendante et a un titre propre.
Chaque histoire commence par un bref résumé (qui dévoile la chute). Puis suit le scénario de l'aventure de Suzette, et enfin pour finir, la fable originale dont vous aurez peut-être deviné le titre...

Téléchargez les scénarios au format EPUB ou au format PDF.




mardi 16 octobre 2012

Basculer dans la vie.

Tout était prévu. Nous avions nos noms de code. Moi, j’étais « Rouge » parce que j’adore cette couleur et en tant que chef de cette expédition j’étais le premier à choisir. Nous étions déterminés à découvrir l’intérieur de la magistrale bâtisse perdue dans la campagne. « Jaune » avait pris avec lui quelques outils pour forcer la porte et couper les fils d’une alarme. Nous attendions « Orangé » cachés dans les fourrés de la propriété. La maison était calme, nous n’étions pas inquiets, nous étions patients, jubilions à l’idée des trésors que nous trouverions dans cette demeure. Mais il fallait encore attendre…
« Orangé » avait prévenu qu’il serait en retard –il devait attendre le retour de son père, car il n’avait pas le droit de laisser sa sœur toute seule- et puis nous avions besoin des grands sacs de patates de sa ferme pour emprisonner le chien.

Nous avions trouvé cette maison lors d’une longue aventure à vélo dans la campagne profonde. Elle était loin de tout, bien loin de chez nous. Ici on ne nous connaissait pas. C’est Jérôme qui l’avait trouvé. Nous nous étions approchés, tout intrigués et fascinés par ses charmes secrets. Nous étions restés longtemps à l’observer, curieux. Horace nous avait assuré avoir vu passer un vieux à travers une fenêtre de l’étage qui jonglait avec des pièces en or. Par la suite il le revoyait sans cesse dans ses rêves…
Belle heureux présage, notre fortune était faite.

En fait, Horace ne sait plus très bien ce qu’il a vu. Il y a bien un vieux monsieur, il se promène presque toujours en fauteuil roulant. Nous avons eu bien plus peur que lui. Tout le monde a crié de terreur, et lui le plus fort. Jérôme a filé tout droit chez lui en oubliant son vélo. Horace s’est étalé dans les escaliers, j’ai dû lui servir d’appui jusqu’à sa maison. Moi ça allait, mais, maman a crié : « Robert ! Alors comme ça tu fais des visites surprise à monsieur Brognard ». Le vieux monsieur était l’instituteur de maman et pour notre punition nous devons l’aider et faire nos leçons chez lui les mercredis après-midi et les samedis matins...
On s’amuse beaucoup avec le chien, il est drôle. Il s’appelle « Gentil ».


mardi 9 octobre 2012

Une terrible beauté est née.

Tout autour de moi, où que je pose le regard, je vois la beauté,
Les façades monumentales, le mouvement dans la vie, le bruissement de la foule.
Mais rien ne m’attire, je ne sais comment m’élancer.
Je suis là.
Et pourtant je voudrais trouver en moi quelque chose à offrir,
Quelque chose de doux, quelque chose pour vibrer.
C’est mon envie de beauté, ma raison de vivre, qui m’imposera une voie.
C’est le rêve que je te destine.

Un sentiment ténu, léger, me pousse à travailler, à répéter inlassablement :
Les attitudes, les mouvements et les expressions... la sueur toujours au front.
Continue, ton chemin est le bon.
Tu es là, je te sens. Présence légère, invisible, éclaire moi !
Tu me pousses à bien faire quand bien même je me trouve ridicule, commun, vide.
Il te faudra encore répéter, persévère !
Les rêves sont-ils seulement accessibles ?
On ne devine pas combien cela peut être douloureux, ce n’est pas
Qu’ils soient impossibles à réaliser, mais le chemin est parsemé de souffrances et de doutes.

Tout t’est possible !
Je te sais maintenant en moi, tu as été mon guide, mon courage, mon souffle.
Une mesure battue par toi, et me voilà les bras levés, avec l’étrange impression que cela est beau.
Comme tu m’es agréable, me voilà renouvelé.
Ton corps est fort, doux et brillant. Il vibre pour moi.
Un geste de toi, aérien, vecteur de l’inspiration et me voilà bouleversé, mes jambes volent,
Mon coeur se gorge de force, mon être se révèle,
Emportant mon corps et transposant ta  beauté  au travers des visages éclaboussés de lumière, amoureux de ta présence.
Grâce à toi me voilà révélée au monde.
Tu me l’offres à mes pieds, je te dois le firmament.
Par ta grâce j’atteins la perfection, je ne vis que pour toi.
Me voilà sublimée par des regards émerveillés.
Le monde tremble et réclame ma présence.
Prenez tout, je suis là pour vous.
Le règne de ma splendeur est sans fin et se nourrit de vous.

Après t’avoir tant adulée, mon ultime regard sur toi est désenchanté.
Ton visage est  terrible, il est celui de l’affreuse vérité, suppliciante à souhait, prenant tout sans aucun dû.
Le chemin fut long. Le temps a marqué les visages, sans oublier d’affaiblir les plus braves.
Ce que tu crus perdre fut donné. Ce que tu offris fut échangé.
Je ne puis t’en vouloir, tu m’as fait vivre un rêve.
Tu m’as poussé jusqu’au bout.
Tu passeras à un autre, me laissant le souvenir amer de ma gloire ridicule.
Adieu chimère, je te laisse à la réalité d’où tu es née.

mardi 2 octobre 2012

Papi est comme ça.

Je n’ai pas loin de chez moi jusqu’à la maison de papi et mamie, vingt minutes en vélo. Cette après-midi mamie est à son cours de poterie, c’est papi qui me gardera. On va aller à la rivière, c’est sûr ! Pour pêcher ! Je crois que ça arrange papi, car ainsi je me tais. Ce n’est pas évident de communiquer avec lui. Quand il y a mamie j’apprends pleins de choses d’eux et de maman. Mais aujourd’hui il fait beau et j’adore pêcher.

Je vois la maison, la Ford mustang rouillée marque l’entrée de la propriété. Je fais un dérapage pour prendre l’allée, des gravillons crépitent sur la carrosserie, heureusement que papi n’entend pas. Je remonte à fond jusqu’au perron, pose le vélo contre la balustrade et descends comme un cow-boy. Je saute comme un cabri sur le plancher de la terrasse et appelle papi, toute la maison en tremble… Il sort avec sa mine désabusée couverte d’un léger rictus, ferme la porte moustiquaire et part, en traînant la jambe, s’assoire sur le banc. Ce n’est pas gagné pour atteindre le ruisseau ! Ces yeux sévères annoncent que les douleurs le reprennent, il me tend une main pour m’inviter à venir. Je lui fais une bise et m’assois à ses côtés. « Ça va aller, shérif ! » lui dis-je en prenant un air dur. Il cligne des yeux avec un hochement de tête. Papi, il fait peur, une vraie tête de gangster, même les mouches ont peurs de lui.
« On peut aller pêcher alors ? », il se lève et me refait le coup des yeux. « Va chercher ton sac papi, on y va ! ». Il n’a pas le temps de faire trois pas que je suis déjà à mon vélo pour prendre ma canne à pêche et mes affaires. « Eh papi, t’as préparé les vers ? », il me pointe du doigt la grange, ou plutôt le tas de fumier et la bêche juste devant. J’ai peur de comprendre et lui fait une moue de chat mouillé, mais il me tourne déjà le dos. J’attends qu’il ressorte, avec son sac.

Le voilà enfin, il se plante devant moi, et me fait un large sourire grimaçant avant de prendre la pose. « Oh non papi ! », je mets bien vingt minutes à trouver une poignée de vers dans ce monticule puant. Quand je suis enfin prêt et débarbouillé, je rejoins papi qui n’a pas bougé, il s’appuie sur moi et on y va, silencieusement… Sur le chemin il expirera quelques mélodies, je chanterai les paroles de celles que je connais.

Quand il y a mamie il s'exprime, et elle me raconte tout… Moi, je ne sais pas encore lire sur les mains.


mardi 25 septembre 2012

Quelques mots...



Le bonheur peut être une fleur dans les décombres,
en grandissant elle embellit tout.



La douleur est un voile dans notre vie,
en regardant à travers assez longtemps,
elle disparaît.


L'accumulation des jours ne prouvent-ils pas
que l'on peut tout surmonter ?
Dommage, il y a des peines qui sont justifiées.



vendredi 14 septembre 2012

Comment écrire un roman ? (par Marie Caillet)


Vous trouverez ci-dessous quelques conseils de Marie Caillet pour écrire un roman... Cela fonctionne aussi pour écrire une pièce de théâtre ou une documentation spécialisée.
Je trouve que c'est une excellente méthode. Je ne la pratique pas avec autant de sérieux et d'organisation mais c'est parce que je suis encore novice :) 
Plus de détails et de nouvelles de Marie sur son blog.
Bonne lecture...

Ecrire un roman, c’est facile. C’est écrire un bon roman qui est difficile. C’est la vie. Si c’était facile, nous serions tous des auteurs best-sellers et on remporterait tous des prix littéraires.

Pour être honnête, il y a des milliers de gens qui vous diront comment écrire un roman. Il y a des milliers de méthodes différentes. La meilleure est celle qui fonctionne avec vous. Je donne souvent des conseils sur la façon d’élaborer un roman et l’un de mes plus connus est celui-ci : comment écrire un roman en utilisant ce que j’appelle « la méthode flocon ». Regardez-la, voyez si ça peut marcher pour vous, et ignorez le reste!

Les 10 étapes...
Avant de commencer à écrire, vous devez vous organiser. Il faut coucher sur le papier toutes ces merveilleuses idées en une forme que vous pouvez utiliser. Pourquoi ? Parce que votre mémoire est faillible, et que votre créativité a probablement laissé beaucoup de trous dans votre histoire. Voici ma méthode en 10 étapes pour écrire une feuille de route (ou travail préparatoire).

Etape 1 : Le résumé promotionnel

Prenez une heure et écrivez le résumé de votre roman en une phrase. Exemple : « un physicien voyageant dans le temps revient en arrière pour tuer l’apôtre Paul. » [Base de Transgression, du même auteur] Il vous servira d’outil de promotion pour un argumentaire face à votre éditeur, aux vendeurs, et plus tard pour les lecteurs. Alors faites-le le meilleur possible !

Quelques astuces pour une bonne phrase :

- Plus c’est court, mieux c’est. Essayez en moins de 15 mots. - Ne donnez pas de noms aux personnages ! Mieux vaut dire « un trapéziste handicapé » que « Jane Doe » - Mélangez l’intrigue générale et l’arrière-plan. Quel personnage a le plus à perdre dans l’histoire ? Maintenant, dites-moi ce qu’elle/il veut gagner. - Lisez les rubriques littéraires des grands journaux, qui listent les best-seller et sont passés maîtres dans l’art de les résumer en une phrase.

Etape 2 : Les grandes étapes de l'histoire.

Prenez une deuxième heure pour développer cette phrase en un paragraphe qui décrit les grandes bases de l’histoire, les principaux points noirs et la fin du roman. J’aime structurer une histoire en « trois drames plus un final ». Chacun des drames prend un quart du livre et la fin, le dernier quart. Je ne sais pas si c’est la stucture idéale, c’est simplement mon goût personnel. (Hollywood l’utilise beaucoup aussi) Si vous croyez dans la « structure en 3 actes », le premier drame correspond à la fin du premier acte. Le second est à la moitié de l’acte II. Le troisième drame est la fin du deuxième acte, et force l’acte III à englober tout le reste. (pour l’intensité du final : c'est préférable de ramasser un peu la fin). Ça convient si le premier drame est causé par des circonstances extérieures, mais je pense que le 2e et le 3e doivent être causés par les tentatives du protagoniste pour arranger les choses. Les choses vont de pire en pire. Idéalement, votre paragraphe aura environ 5 phrases. Une phrase pour donner l’arrière-plan et les grandes lignes de l’histoire. Une phrase pour chacun de vos drames. Puis une phrase pour raconter la fin.

Etape 3 : La fiche personnage(s) principale(s).

Les étapes ci-dessus vous donnent un meilleur aperçu de votre roman. Vous avez maintenant besoin de la même chose pour l’histoire de vos protagonistes. Les personnages sont la partie la plus importante d’un roman, et le temps que vous mettrez à les créer sera largement dédommagé quand vous commencerez l’écriture. Pour chacun de vos personnages principaux, prenez une heure pour écrire en une page un résumé qui détaille :

- Le nom du personnage - Un résumé en une phrase de l’histoire du personnage - Les motivations du personnage (que veut-elle/il de façon abstraite ?) - Les buts du personnage (que veut-elle/il, concrètement ?) - Les conflits du personnage (qu’est-ce qui l’empêche d’atteindre son but ?) - Sa progression (qu’apprend-elle/il, comment évolue-t-elle/il ?)

Attention : ça n’a pas à être parfait. Le but de chaque étape est de vous faire avancer vers l’étape suivante. Vous pouvez toujours revenir en arrière et corriger quand vous comprenez mieux l’histoire. Vous aurez à le faire, sauf si vous êtes plus ordonné que moi !

Etape 4 : Développer chaque phrase du résumé de départ.

A ce niveau, vous avez normalement une bonne idée de la structure globale de votre roman. Si l’histoire ne fonctionne pas, vous le savez maintenant, plutôt qu’après 500 heures à galérer sur un premier brouillon.

Maintenant, vous allez développer l’histoire. Prenez plusieurs heures et développez chaque phrase de votre résumé en un paragraphe complet. Chacun, sauf le dernier paragraphe, doit finir avec une complication. Le dernier paragraphe doit expliquer la fin du livre. A la fin de l’exercice, vous obtenez un squelette de votre roman en une page. Pas de souci si vous ne pouvez pas avoir tout sur une seule page. Ce qui importe, c’est d’avoir développé les idées qui seront au cœur de l’histoire. Ici vous développez le conflit.

Etape 5 : Les fiches des personnages !

Prenez un jour ou deux (j’en déduis que pour les pas patients, il faut faire ça pendant les vacances ^^) et écrivez en une page la description de chaque personnage principal, et en une demi-page la description des autres personnages. Ces « synopsis des personnages » doivent raconter l’histoire selon le point de vue de chacun. Comme toujours, vous êtes libre de revenir aux points précédents et de les corriger quand vous apprenez des nouvelles choses sur vos personnages.

Etape 6 : Synopsis de l'intrigue.

Prenez une semaine et développez votre intrigue d’une page en un synopsis de quatre pages. De façon basique, vous allez développer chaque paragraphe de l’étape 4 en une page complète. C’est une étape très plaisante, car vous devez envisager la logique générale de l’histoire et faire des choix stratégiques. Ici, vous allez sûrement vouloir revenir en arrière et revoir des étapes, à mesure que de nouvelles idées vous viennent en tête.

Etape 7 : Bien cerner tout le personnage.

Prenez une autre semaine pour développer la description de votre personnage en une fiche de personnage intégrale, qui détaille tout ce qu’il y a à savoir sur chaque personnage.

Fiche standard : naissance, description, histoire, motivation, but (j’ajouterai : doutes, faiblesses, peurs, qualités, voire signes du Zodiaque si ça vous parle) (pour la petite histoire, My est Gémeaux, Orest Scorpion, Allian Verseau) Le plus important, c’est : comment ce personnage aura évolué à la fin. C’est un ajout à votre travail de l’étape 3, qui vous apprendra beaucoup sur vos personnages. Vous reviendrez probablement en arrière pour réviser les étapes 1 à 6 quand votre personnage deviendra « réel » pour vous et commencera à faire des revendications (ça sent le vécu, héhé). C’est très bien – une bonne histoire est conduite par les personnages. Prenez autant de temps qu’il vous faut, ce sera autant de gagné pour après. Quand vous avez fini, vous avez largement ce qu’il vous faut pour écrire un argumentaire pour un éditeur.

Etape 8 : Lister toutes les scènes.

Vous êtes libre de sauter cette étape-là. Avant d’écrire le roman, il y a 2-3 choses que vous pouvez faire pour rendre le premier jet moins traumatisant. La première, c’est de prendre votre synopsis de 4 pages et de faire une liste de toutes les scènes dont vous aurez besoin pour changer l’histoire en roman. Et la meilleure façon de faire cette liste, c’est… un tableur.

Pour un tas de raisons, le tableur terrifie beaucoup d’auteurs. Pourtant, le tableur est d’utilisation plus facile qu’un logiciel de traitement de texte. Vous devez faire une liste de scènes, or, les tableurs ont été inventés pour faire des listes.

Prenez une ligne pour chaque scène. Dans une colonne, mettez le point de vue du personnage. Dans une autre colonne (vide), dites ce qui se passe dans la scène. Si ça vous amuse, ajoutez d’autres colonnes pour le nombre de pages que vous prévoyez d’écrire pour telle ou telle scène. Un tableur est idéal, parce que vous pouvez voir l’ensemble du scénario en un coup d’œil, et c’est facile de bouger les scènes quand vous réorganisez le scénario.

Etape 9 : Mettre au propre. (pas obligatoire, je ne la fais plus)

Revenez sur word (ou autre logiciel de traitement de texte) et commencez à écrire une description (narrative) de votre histoire. Prenez chaque ligne de votre tableur et développez-le en une description de plusieurs paragraphes pour une scène. Mettez les extraits de dialogues que vous avez en tête, et esquissez le conflit principal de la scène. S’il n’y a pas de conflit, vous le saurez ici, et vous devrez soit ajouter un conflit, soit effacer la scène. (conflit est à prendre au sens large : pour moi, c’est plutôt « enjeu », il faut qu’il se passe quelque chose, et pas forcément d’un point de vue actif, ça peut être aussi psychologique)

Etape 10 : C'est partie pour un roman :)

Arrivé là, asseyez-vous et commencez le vrai premier jet de votre histoire. Vous serez surpris de voir à quel point l’histoire coule vite de vos doigts. On peut penser que toute créativité est bannie de l’histoire. En réalité, pas du tout, à moins que vous ayez trop développé votre analyse en écrivant votre flocon. Ceci est censé être la partie amusante, parce qu’il y a beaucoup de petits problèmes de logique qui surgissent. Comment le héros sort-il de cet arbre encerclé par des alligatoirs, et comment sauve-t-il l’héroïne restée dans la barque en feu ? C’est le moment d’expliquer ! Mais c’est amusant, parce que vous connaissez déjà la structure globale du roman. Vous n’avez donc qu’à résoudre un nombre limité de problèmes, et vous pouvez écrire relativement vite.

Cette étape est incroyablement drôle et excitante. J’ai entendu beaucoup d’auteurs de fiction se plaindre de la difficulté d’écrire un premier jet. Invariablement, c’est parce qu’ils n’ont pas d’indices sur ce qui arrive ensuite. Réel problème ! La vie est trop courte pour écrire comme ça ! Il n’y a pas de raison de gâcher 500 heures à écrire un premier jet bancal quand vous pouvez écrire un roman solide en 150 heures. Même en comptant les 100 heures pour le travail préparatoire, vous gagnez du temps.

A la moitié du premier jet, j’ai l’habitude de faire une pause et de corriger toutes les parties problématiques de mon travail préparatoire. Oui, le travail préparatoire n’est pas parfait. Ce n’est pas grave. Le travail préparatoire n’est pas ancré dans le concret, c’est un ensemble vivant de documents qui grandissent en même temps que votre roman. Si vous faites bien votre boulot, à la fin du premier jet, vous rirez du bric-à-brac d’amateur qu’était votre travail préparatoire. Et vous serez abasourdi de voir à quel point votre histoire s’est approfondie.

lundi 10 septembre 2012

Un homme sans elle


« La violence ne résout rien, la douleur n’arrange rien. »

C’est samedi, Estelle et Hervé vont flâner dans les magasins, aller au cinéma et manger au restaurant.

C'est samedi, dans une rue passante des malfrats font affaire sans trouver d'accord.

C'est un samedi soir, comme il en arrive dans les "faits divers"...





S C É N A R I O


A C T E   1   :   La bonne nouvelle


Scène 1 : Intérieur/ Matin

Une jeune femme, Estelle, attend patiemment assise sur le rebord de la baignoire que son test de grossesse se révèle positif. Elle trépigne et se met à rêver. Le temps d’attente est écoulé, elle sursaute, elle est enceinte. Elle est heureuse.

Estelle – Oh putain !... Hervé ?

Estelle appelle son mari, elle le cherche, elle a une bonne nouvelle. Il est dans le salon, devant la télé, il se lève curieux de l’entendre euphorique.

Hervé – Je suis là, qu’est-ce qu’il y a ?

Estelle – ça y est c’est fait !

Hervé – Ah ben tant mieux, si c’est déjà fait !

Il va pour se rasseoir mais comprend qu’Estelle lui dit qu'elle est enceinte.

Hervé – Ah… ça y est c’est fait !

Estelle – Oui !

Ils s’étreignent fort. Hervé la soulève et la fait tourner.

Hervé – Aujourd’hui c’est la fête ! Je sais déjà ce que je vais acheter.

Estelle sourit à cette phrase car il a toujours dit que la première chose qu’il achèterait serait des petits chaussons.


A C T E   2   :   Une journée de shopping


Scène 1 : Extérieur/ Jour

Hervé et Estelle vont fêter l’évènement. C’est samedi, ils vont faire les boutiques. Durant cette journée il y aura beaucoup de câlins, de rire, de joie, de bonheur à deux et un petit jeu entre eux autour de cette question : « Sont-ils les seuls dans cette ville à attendre ou désirer un bébé ? »

Hervé et Estelle font du « lèche-vitrine » et dévisagent les passants.

Estelle – Tu crois qu’ils l’ont fait ? (désignant un couple de leur âge, calme, fatigué et muet)

Hervé – Ils n’y pensent même pas, mais c’est parce qu’on a pris leur tour !

Estelle – Et eux là-bas, ils sont mignons, mais ils ont encore le temps (elle regarde des ados amoureux).

Hervé – Ils ne sont pas prêts d’y arriver, entre capote et pilule, il n’y a même pas la place d’une telle pensée.


Scène 2 : Intérieur/ Jour

Estelle va acheter une robe pour femme enceinte. Hervé va craquer pour des petits chaussons pour bébé. Il les secoue sous le nez d’Estelle et part tout sourire vers la caisse. Il portera toutes ces affaires le reste de la journée dans un sac à dos.


Scène 3 : Extérieur/ Jour

Ils sortent de la boutique. Hervé tient bêtement serré contre son coeur le sac avec les précieux achats.

Estelle – Et lui qui fait un clin d’œil à sa copine là-haut, tu crois qu’ils viennent de le faire ?

Hervé tourne la tête à droite. Estelle et Hervé regardent Martial de l’autre côté de la rue, il fait signe à une fille à la fenêtre qui lui rend son salut.

Hervé – Difficile à dire, mais ils ont l’air d’en prendre le chemin.


Scène 4 : Extérieur/ Jour

Ils vont se promener dans la ville, grignotent à midi un sandwich en se baladant dans un parc.

Estelle – Et eux là-bas ? (ce sont deux personnes âgées qui se regardent en faisant la tête)

Hervé – J’ai l’impression qu’ils ne s’en sont pas encore remis.

Estelle et Hervé pouffent de rire avec l’air gêné d’être démasqués.


Scène 5 : Extérieur/ Jour

Vient ensuite le hall d’un grand cinéma avec le choix d’un film à l’eau de rose par Estelle et accepté de bon cœur par Hervé.


Scène 6 : Intérieur/ Nuit

Enfin il y a un bon restaurant pour le dîner. On voit Hervé jouer avec une boule de pain coupée en deux, prolongée de fourchettes animées comme des jambes. Estelle fait mine qu’il est fou. Plus tard Hervé reprendra ses demi boules qu’il aura habillées de petits chaussons pour bébé. Estelle lui saute au cou.


A C T E   3   :   Au tour du drame


Scène 1 : Extérieur/ Nuit

Martial et Stéphane arrivent à pied, leur moto est garée plus loin. Ils arrivent au lieu exact du rendez-vous.

Un homme un peu plus loin les observe de sa voiture. Il donne un dernier conseil à son copilote stressé. Ils sont là depuis longtemps, des boîtes de sandwich et soda traînent sur le tableau de bord (Ils viennent d’un département voisin).

Ben – Je négocie, je paie et on s’en va. Tu restes ici et tu gueules s’il y a quelque chose.

Ben sort du véhicule et va à leur rencontre. Le copilote surveille la scène dans le rétroviseur.

Martial – C’est bien Ben, tu changes de braquet !

Ben – Tu as la poudre ?

Martial – Deux sacs de 1 kg dans des poches solubles. Tu les balances dans le Rhône et tu auras tout perdu sans laisser de trace. Tu as l’argent ?

Ben – J’ai réuni des fonds pour 1 kg, 38.000€.

Martial – Tu te fiches de moi ! C’est maintenant que tu préviens ! Tu crois que l'on promène la cocaïne par chez nous ?

Ben – J’ai la moitié, je te prends que la moitié !

Martial – Mais le prix n’est plus le même quand on prend un kilo !

Ben – On fait le deal avec la moitié !

Ben sort une arme de sa poche en guise d’argument. Il veut seulement la montrer, pensant les impressionner.

Hervé et Estelle sont plus loin dans la rue, ils sortent du restaurant. Ils se retournent quand ils entendent les cris. Hervé voit Martial, les autres sont de dos ou dans l’obscurité (Hervé voit Martial avec le même angle de vue de la scène 2).

Stéphane – Attention il a une arme !

Stéphane sort son arme. Ben panique et tend son arme pour tirer. Martial sort son arme. Ben tire et touche légèrement Stéphane qui tire par réflexe, mais la balle se perd et touche Estelle plus loin au bout de la rue. Martial tire et blesse Ben qui s’écroule. Il est gravement blessé.

Martial – On se tire !

Le copilote est paniqué dans la voiture mais réussit à sortir pour venir en aide à Ben. Martial et Stéphane sont déjà loin. Le copilote transporte Ben dans la voiture et fuit.

Hervé tient Estelle dans ses bras. Elle est étendue au sol, sans vie.




Vous avez-dit court-métrage ? Si ce texte vous plaît n'hésitez pas à me demander les droits... Je ne suis pas gourmand et sais me contenter de mon nom au générique.

mardi 14 août 2012

Emotion en trois temps.

L'instant après l'orage, il pleuvait sans cesse, je crois qu’Edwige avait parlé de nous rapprocher (?). J’en avais le cœur tout disposé à exploser ; mes tempes déjà martelaient mon émoi ; ma tête en était presque à bouillir ; et pourtant c’était bon…

J’entrevis un instant l’image, tant projetée, de ses lèvres, de mes lèvres, de notre premier baissé.

Maintenant je peux le dire, c’est une histoire enterrée. Je n’ai pas réussi à l’embrasser, elle m’a giflé avant.


mardi 7 août 2012

Historique des messages d'accueil

(Introduction)
J'espère vous revoir bientôt... En attendant, je travaille à améliorer et alimenter ce blog.

(Mars 2019)
J'ai toujours cette tragédie en tête, "Urmatémé", mais avant je voudrais écrire une suite à mon roman de SF "Tratinium" que j'ai mis en ligne sur amazon. Et aussi écrire une autre idée de roman, une histoire familiale, aux débuts de l'automobile.
Pour cela je passe au 3/5ième dans mon boulot et je me mets au vert, du côté d'Ambert. On va voir si ce nouveau mode de vie me permettra de me replonger dans l'écriture. En tout cas, je vais pouvoir prendre le temps, pour moi, pour le potager et pour l'improvisation. Car je continuerai à Ambert de pratiquer le théâtre d'improvisation, et j'espère donner le goût du jeu à d'autres personnes.

(Novembre 2012)
Mon prochain projet d'écriture est une tragédie, malheureusement je la reporte sans cesse car je voudrais re-re-lire mon roman de SF (pour le finaliser), et puis, il y a aussi quelques poésies et nouvelles qui me retiennent et me tiennent à coeur. En plus de ça, il faut que je vous dise, j'ai repris le travail et je suis des cours de théâtre d'improvisation au Repaire (j'ai fait mon premier match en public le 7 novembre, trop sympa :D).
Mon congé sabbatique, c'est déjà du passé. Le bilan ?
C'est vraiment un truc à faire ! Ecrire c'est un métier. Ce n'est pas que ce soit dur ou facile, c'est juste que c'est du temps... Bon alors, du temps j'en ai pris (et donc j'en avais)... Mais comme c'était la première fois, j'avoue que j'en ai profité aussi pour sortir me balader sur le coup de 15h, faire du bricolage, cuisiner de bons petits plats et faire le ménage (et oui! quand on vit tout le jour chez soi, on s'arrange pour être au propre :).
Enfin, bref, la formation est terminée. Je suis reçu :) et dès que j'ai une offre, j'en ferais mon métier.

(Mars 2012)
Mon prochain projet d'écriture est encore une pièce de théâtre, cette fois ce sera une tragédie :)
Je prends des bouts de notes depuis 2004 et certains donnent lieu à une pièce, un roman ou juste une pensée. Mais c'est un roman de SF "Tratinium" qui voit le jour en 2008. Depuis je ne l'ai toujours pas relu pour le finaliser (je fais ça de suite!).
C'est en ayant essayé un cours de théâtre en 2009 que je me suis mis à ne penser qu'à ça :) Depuis je continue les cours et écris encore plus... J'ai encore accumulé pleins de notes et j'ai écrit en 2010 ma première pièce de théâtre "Des maux en famille" que j'ai finalisé depuis peu.
Je suis depuis octobre 2011 en congé sabbatique (développeur en informatique) avec pour objectif d'écrire un roman. Pour l'instant j'ai écrit 2 autres pièces de théâtre LOL et toujours pas de roman, pourtant j'ai déjà trois sujets en tête.

(Formule de fin :)
Bon allez, sérieux... Je m'y remets.

mardi 31 juillet 2012

L'Homme qui plantait des arbres (Jean Giono)

Voici une très belle histoire, de Jean Giono, rédigée dans la nuit du 24 au 25 février 1953 :)

Mais avant, quelques propos de Jean Gino :
- C’est un de mes textes dont je suis le plus fier. Il ne me rapporte pas un centime et c’est pourquoi il accomplit ce pour quoi il a été écrit.
- C'est un berger du Contadour : un berger qui a une idée. Toute sa vie, il a ses poches pleines de glands ; il marche sans cesse et, partout où il s'arrête, il plante sa canne ferrée dans le sol — pic ! il se baisse et il enfouit un gland. Plac ! Il donne dessus un coup de talon, et hop ! il continue plus loin. Toute sa vie. Elzéar.
- J’ai donné mes droits gratuitement pour toutes les reproductions.
Et pour connaître tous les détails sur la génèse de l'histoire : wikipédia


L'Homme qui plantait des arbres.

Pour que le caractère d’un être humain dévoile des qualités vraiment exceptionnelles, il faut avoir la bonne fortune de pouvoir observer son action pendant de longues années. Si cette action est dépouillée de tout égoïsme, si l’idée qui la dirige est d’une générosité sans exemple, s’il est absolument certain qu’elle n’a cherché de récompense nulle part et qu’au surplus elle ait laissé sur le monde des marques visibles, on est alors, sans risque d’erreurs, devant un caractère inoubliable.

Il y a environ une quarantaine d’années, je faisais une longue course à pied, sur des hauteurs absolument inconnues des touristes, dans cette très vieille région des Alpes qui pénètre en Provence.
Cette région est délimitée au sud-est et au sud par le cours moyen de la Durance, entre Sisteron et Mirabeau ; au nord par le cours supérieur de la Drôme, depuis sa source jusqu’à Die ; à l’ouest par les plaines du Comtat Venaissin et les contreforts du Mont-Ventoux. Elle comprend toute la partie nord du département des Basses-Alpes, le sud de la Drôme et une petite enclave du Vaucluse.

C’était, au moment où j’entrepris ma longue promenade dans ces déserts, des landes nues et monotones, vers 1200 à 1300 mètres d’altitude. Il n’y poussait que des lavandes sauvages.
Je traversais ce pays dans sa plus grande largeur et, après trois jours de marche, je me trouvais dans une désolation sans exemple. Je campais à côté d’un squelette de village abandonné. Je n’avais plus d’eau depuis la veille et il me fallait en trouver. Ces maisons agglomérées, quoique en ruine, comme un vieux nid de guêpes, me firent penser qu’il avait dû y avoir là, dans le temps, une fontaine ou un puits. Il y avait bien une fontaine, mais sèche. Les cinq à six maisons, sans toiture, rongées de vent et de pluie, la petite chapelle au clocher écroulé, étaient rangées comme le sont les maisons et les chapelles dans les villages vivants, mais toute vie avait disparu.

C’était un beau jour de juin avec grand soleil, mais sur ces terres sans abri et hautes dans le ciel, le vent soufflait avec une brutalité insupportable. Ses grondements dans les carcasses des maisons étaient ceux d’un fauve dérangé dans son repas.
Il me fallut lever le camp. À cinq heures de marche de là, je n’avais toujours pas trouvé d’eau et rien ne pouvait me donner l’espoir d’en trouver. C’était partout la même sécheresse, les mêmes herbes ligneuses. Il me sembla apercevoir dans le lointain une petite silhouette noire, debout. Je la pris pour le tronc d’un arbre solitaire. À tout hasard, je me dirigeai vers elle.

C’était un berger. Une trentaine de moutons couchés sur la terre brûlante se reposaient près de lui.
Il me fit boire à sa gourde et, un peu plus tard, il me conduisit à sa bergerie, dans une ondulation du plateau. Il tirait son eau - excellente - d’un trou naturel, très profond, au-dessus duquel il avait installé un treuil rudimentaire.
Cet homme parlait peu. C’est le fait des solitaires, mais on le sentait sûr de lui et confiant dans cette assurance. C’était insolite dans ce pays dépouillé de tout. Il n’habitait pas une cabane mais une vraie maison en pierre où l’on voyait très bien comment son travail personnel avait rapiécé la ruine qu’il avait trouvé là à son arrivée. Son toit était solide et étanche. Le vent qui le frappait faisait sur les tuiles le bruit de la mer sur les plages.
Son ménage était en ordre, sa vaisselle lavée, son parquet balayé, son fusil graissé ; sa soupe bouillait sur le feu. Je remarquai alors qu’il était aussi rasé de frais, que tous ses boutons étaient solidement cousus, que ses vêtements étaient reprisés avec le soin minutieux qui rend les reprises invisibles.
Il me fit partager sa soupe et, comme après je lui offrais ma blague à tabac, il me dit qu’il ne fumait pas. Son chien, silencieux comme lui, était bienveillant sans bassesse.

Il avait été entendu tout de suite que je passerais la nuit là ; le village le plus proche était encore à plus d’une journée et demie de marche. Et, au surplus, je connaissais parfaitement le caractère des rares villages de cette région. Il y en a quatre ou cinq dispersés loin les uns des autres sur les flans de ces hauteurs, dans les taillis de chênes blancs à la toute extrémité des routes carrossables. Ils sont habités par des bûcherons qui font du charbon de bois.
Ce sont des endroits où l’on vit mal. Les familles serrées les unes contre les autres dans ce climat qui est d’une rudesse excessive, aussi bien l’été que l’hiver, exaspèrent leur égoïsme en vase clos. L’ambition irraisonnée s’y démesure, dans le désir continu de s’échapper de cet endroit.
Les hommes vont porter leur charbon à la ville avec leurs camions, puis retournent. Les plus solides qualités craquent sous cette perpétuelle douche écossaise. Les femmes mijotent des rancœurs. Il y a concurrence sur tout, aussi bien pour la vente du charbon que pour le banc à l’église, pour les vertus qui se combattent entre elles, pour les vices qui se combattent entre eux et pour la mêlée générale des vices et des vertus, sans repos. Par là-dessus, le vent également sans repos irrite les nerfs. Il y a des épidémies de suicides et de nombreux cas de folies, presque toujours meurtrières.

Le berger qui ne fumait pas alla chercher un petit sac et déversa sur la table un tas de glands. Il se mit à les examiner l’un après l’autre avec beaucoup d’attention, séparant les bons des mauvais. Je fumais ma pipe. Je me proposai pour l’aider. Il me dit que c’était son affaire. En effet : voyant le soin qu’il mettait à ce travail, je n’insistai pas. Ce fut toute notre conversation.
Quand il eut du côté des bons un tas de glands assez gros, il les compta par paquets de dix. Ce faisant, il éliminait encore les petits fruits ou ceux qui étaient légèrement fendillés, car il les examinait de fort près. Quand il eut ainsi devant lui cent glands parfaits, il s’arrêta et nous allâmes nous coucher.

La société de cet homme donnait la paix. Je lui demandai le lendemain la permission de me reposer tout le jour chez lui. Il le trouva tout naturel, ou, plus exactement, il me donna l’impression que rien ne pouvait le déranger.
Ce repos ne m’était pas absolument obligatoire, mais j’étais intrigué et je voulais en savoir plus. Il fit sortir son troupeau et il le mena à la pâture. Avant de partir, il trempa dans un seau d’eau le petit sac où il avait mis les glands soigneusement choisis et comptés.
Je remarquai qu’en guise de bâton, il emportait une tringle de fer grosse comme le pouce et longue d’environ un mètre cinquante. Je fis celui qui se promène en se reposant et je suivis une route parallèle à la sienne. La pâture de ses bêtes était dans un fond de combe. Il laissa le petit troupeau à la garde du chien et il monta vers l’endroit où je me tenais. J’eus peur qu’il vînt pour me reprocher mon indiscrétion mais pas du tout : c’était sa route et il m’invita à l’accompagner si je n’avais rien de mieux à faire. Il allait à deux cents mètres de là, sur la hauteur.

Arrivé à l’endroit où il désirait aller, il se mit à planter sa tringle de fer dans la terre. Il faisait ainsi un trou dans lequel il mettait un gland, puis il rebouchait le trou. Il plantait des chênes. Je lui demandai si la terre lui appartenait. Il me répondit que non. Savait-il à qui elle était ? Il ne savait pas. Il supposait que c’était une terre communale, ou peut-être, était-elle propriété de gens qui ne s’en souciaient pas ? Lui ne se souciait pas de connaître les propriétaires. Il planta ainsi cent glands avec un soin extrême.
Après le repas de midi, il recommença à trier sa semence. Je mis, je crois, assez d’insistance dans mes questions puisqu’il y répondit. Depuis trois ans il plantait des arbres dans cette solitude. Il en avait planté cent mille. Sur les cent mille, vingt mille était sortis. Sur ces vingt mille, il comptait encore en perdre la moitié, du fait des rongeurs ou de tout ce qu’il y a d’impossible à prévoir dans les desseins de la Providence. Restaient dix mille chênes qui allaient pousser dans cet endroit où il n’y avait rien auparavant.

C’est à ce moment là que je me souciai de l’âge de cet homme. Il avait visiblement plus de cinquante ans. Cinquante-cinq, me dit-il. Il s’appelait Elzéard Bouffier. Il avait possédé une ferme dans les plaines. Il y avait réalisé sa vie. Il avait perdu son fils unique, puis sa femme. Il s’était retiré dans la solitude où il prenait plaisir à vivre lentement, avec ses brebis et son chien. Il avait jugé que ce pays mourait par manque d’arbres. Il ajouta que, n’ayant pas d’occupations très importantes, il avait résolu de remédier à cet état de choses.

Menant moi-même à ce moment-là, malgré mon jeune âge, une vie solitaire, je savais toucher avec délicatesse aux âmes des solitaires. Cependant, je commis une faute. Mon jeune âge, précisément, me forçait à imaginer l’avenir en fonction de moi-même et d’une certaine recherche du bonheur. Je lui dis que, dans trente ans, ces dix mille chênes seraient magnifiques. Il me répondit très simplement que, si Dieu lui prêtait vie, dans trente ans, il en aurait planté tellement d’autres que ces dix mille seraient comme une goutte d’eau dans la mer.
Il étudiait déjà, d’ailleurs, la reproduction des hêtres et il avait près de sa maison une pépinière issue des faînes. Les sujets qu’il avait protégés de ses moutons par une barrière en grillage, étaient de toute beauté. Il pensait également à des bouleaux pour les fonds où, me dit-il, une certaine humidité dormait à quelques mètres de la surface du sol.

Nous nous séparâmes le lendemain.

L’année d’après, il y eut la guerre de 14 dans laquelle je fus engagé pendant cinq ans. Un soldat d’infanterie ne pouvait guère y réfléchir à des arbres. À dire vrai, la chose même n’avait pas marqué en moi : je l’avais considérée comme un dada, une collection de timbres, et oubliée.
Sorti de la guerre, je me trouvais à la tête d’une prime de démobilisation minuscule mais avec le grand désir de respirer un peu d’air pur. C’est sans idée préconçue - sauf celle-là - que je repris le chemin de ces contrées désertes.

Le pays n’avait pas changé. Toutefois, au-delà du village mort, j’aperçus dans le lointain une sorte de brouillard gris qui recouvrait les hauteurs comme un tapis. Depuis la veille, je m’étais remis à penser à ce berger planteur d’arbres. « Dix mille chênes, me disais-je, occupent vraiment un très large espace ».
J’avais vu mourir trop de monde pendant cinq ans pour ne pas imaginer facilement la mort d’Elzéar Bouffier, d’autant que, lorsqu’on en a vingt, on considère les hommes de cinquante comme des vieillards à qui il ne reste plus qu’à mourir. Il n’était pas mort. Il était même fort vert. Il avait changé de métier. Il ne possédait plus que quatre brebis mais, par contre, une centaine de ruches. Il s’était débarrassé des moutons qui mettaient en péril ses plantations d’arbres. Car, me dit-il (et je le constatais), il ne s’était pas du tout soucié de la guerre. Il avait imperturbablement continué à planter.

Les chênes de 1910 avaient alors dix ans et étaient plus hauts que moi et que lui. Le spectacle était impressionnant. J’étais littéralement privé de parole et, comme lui ne parlait pas, nous passâmes tout le jour en silence à nous promener dans sa forêt. Elle avait, en trois tronçons, onze kilomètres de long et trois kilomètres dans sa plus grande largeur. Quand on se souvenait que tout était sorti des mains et de l’âme de cet homme - sans moyens techniques - on comprenait que les hommes pourraient être aussi efficaces que Dieu dans d’autres domaines que la destruction.
Il avait suivi son idée, et les hêtres qui m’arrivaient aux épaules, répandus à perte de vue, en témoignaient. Les chênes étaient drus et avaient dépassé l’âge où ils étaient à la merci des rongeurs ; quant aux desseins de la Providence elle-même, pour détruire l’œuvre créée, il lui faudrait avoir désormais recours aux cyclones.
Il me montra d’admirables bosquets de bouleaux qui dataient de cinq ans, c’est-à-dire de 1915, de l’époque où je combattais à Verdun. Il leur avait fait occuper tous les fonds où il soupçonnait, avec juste raison, qu’il y avait de l’humidité presque à fleur de terre. Ils étaient tendres comme des adolescents et très décidés.

La création avait l’air, d’ailleurs, de s’opérer en chaînes. Il ne s’en souciait pas ; il poursuivait obstinément sa tâche, très simple. Mais en redescendant par le village, je vis couler de l’eau dans des ruisseaux qui, de mémoire d’homme, avaient toujours été à sec. C’était la plus formidable opération de réaction qu’il m’ait été donné de voir. Ces ruisseaux secs avaient jadis porté de l’eau, dans des temps très anciens. Certains de ces villages tristes dont j’ai parlé au début de mon récit s’étaient construits sur les emplacements d’anciens villages gallo-romains dont il restait encore des traces, dans lesquelles les archéologues avaient fouillé et ils avaient trouvé des hameçons à des endroits où au vingtième siècle, on était obligé d’avoir recours à des citernes pour avoir un peu d’eau.

Le vent aussi dispersait certaines graines. En même temps que l’eau réapparut réapparaissaient les saules, les osiers, les prés, les jardins, les fleurs et une certaine raison de vivre.
Mais la transformation s’opérait si lentement qu’elle entrait dans l’habitude sans provoquer d’étonnement. Les chasseurs qui montaient dans les solitudes à la poursuite des lièvres ou des sangliers avaient bien constaté le foisonnement des petits arbres mais ils l’avaient mis sur le compte des malices naturelles de la terre. C’est pourquoi personne ne touchait à l’œuvre de cet homme. Si on l’avait soupçonné, on l’aurait contrarié. Il était insoupçonnable. Qui aurait pu imaginer, dans les villages et dans les administrations, une telle obstination dans la générosité la plus magnifique ?

À partir de 1920, je ne suis jamais resté plus d’un an sans rendre visite à Elzéard Bouffier. Je ne l’ai jamais vu fléchir ni douter. Et pourtant, Dieu sait si Dieu même y pousse ! Je n’ai pas fait le compte de ses déboires. On imagine bien cependant que, pour une réussite semblable, il a fallu vaincre l’adversité ; que, pour assurer la victoire d’une telle passion, il a fallu lutter avec le désespoir. Il avait, pendant un an, planté plus de dix mille érables. Ils moururent tous. L’an d’après, il abandonna les érables pour reprendre les hêtres qui réussirent encore mieux que les chênes.
Pour avoir une idée à peu près exacte de ce caractère exceptionnel, il ne faut pas oublier qu’il s’exerçait dans une solitude totale ; si totale que, vers la fin de sa vie, il avait perdu l’habitude de parler. Ou, peut-être, n’en voyait-il pas la nécessité ?

En 1933, il reçut la visite d’un garde forestier éberlué. Ce fonctionnaire lui intima l’ordre de ne pas faire de feu dehors, de peur de mettre en danger la croissance de cette forêt naturelle. C’était la première fois, lui dit cet homme naïf, qu’on voyait une forêt pousser toute seule. A cette époque, il allait planter des hêtres à douze kilomètres de sa maison. Pour s’éviter le trajet d’aller-retour - car il avait alors soixante-quinze ans - il envisageait de construire une cabane de pierre sur les lieux mêmes de ses plantations. Ce qu’il fit l’année d’après.

En 1935, une véritable délégation administrative vint examiner la « forêt naturelle ». Il y avait un grand personnage des Eaux et Forêts, un député, des techniciens. On prononça beaucoup de paroles inutiles. On décida de faire quelque chose et, heureusement, on ne fit rien, sinon la seule chose utile : mettre la forêt sous la sauvegarde de l’État et interdire qu’on vienne y charbonner. Car il était impossible de n’être pas subjugué par la beauté de ces jeunes arbres en pleine santé. Et elle exerça son pouvoir de séduction sur le député lui-même.

J’avais un ami parmi les capitaines forestiers qui était de la délégation. Je lui expliquai le mystère. Un jour de la semaine d’après, nous allâmes tous les deux à la recherche d’Elzéard Bouffier. Nous le trouvâmes en plein travail, à vingt kilomètres de l’endroit où avait eu lieu l’inspection. Ce capitaine forestier n’était pas mon ami pour rien. Il connaissait la valeur des choses. Il sut rester silencieux. J’offris les quelques œufs que j’avais apportés en présent. Nous partageâmes notre casse-croûte en trois et quelques heures passèrent dans la contemplation muette du paysage. Le côté d’où nous venions était couvert d’arbres de six à sept mètres de haut. Je me souvenais de l’aspect du pays en 1913 : le désert… Le travail paisible et régulier, l’air vif des hauteurs, la frugalité et surtout la sérénité de l’âme avaient donné à ce vieillard une santé presque solennelle. C’était un athlète de Dieu. Je me demandais combien d’hectares il allait encore couvrir d’arbres. Avant de partir, mon ami fit simplement une brève suggestion à propos de certaines essences auxquelles le terrain d’ici paraissait devoir convenir. Il n’insista pas. « Pour la bonne raison, me dit-il après, que ce bonhomme en sait plus que moi. » Au bout d’une heure de marche – l’idée ayant fait son chemin en lui - il ajouta : « Il en sait beaucoup plus que tout le monde. Il a trouvé un fameux moyen d’être heureux ! »

C’est grâce à ce capitaine que, non seulement la forêt, mais le bonheur de cet homme furent protégés. Il fit nommer trois gardes-forestiers pour cette protection et il les terrorisa de telle façon qu’ils restèrent insensibles à tous les pots-de-vin que les bûcherons pouvaient proposer.
L’œuvre ne courut un risque grave que pendant la guerre de 1939. Les automobiles marchant alors au gazogène, on n’avait jamais assez de bois. On commença à faire des coupes dans les chênes de 1910, mais ces quartiers sont si loin de tous réseaux routiers que l’entreprise se révéla très mauvaise au point de vue financier. On l’abandonna. Le berger n’avait rien vu. Il était à trente kilomètres de là, continuant paisiblement sa besogne, ignorant la guerre de 39 comme il avait ignoré la guerre de 14.

J’ai vu Elzéard Bouffier pour la dernière fois en juin 1945. Il avait alors quatre-vingt-sept ans.
J’avais donc repris la route du désert, mais maintenant, malgré le délabrement dans lequel la guerre avait laissé le pays, il y avait un car qui faisait le service entre la vallée de la Durance et la montagne. Je mis sur le compte de ce moyen de transport relativement rapide le fait que je ne reconnaissais plus les lieux de mes dernières promenades. Il me semblait aussi que l’itinéraire me faisait passer par des endroits nouveaux. J’eus besoin d’un nom de village pour conclure que j’étais bien cependant dans cette région jadis en ruine et désolée. Le car me débarqua à Vergons. En 1913, ce hameau de dix à douze maisons avait trois habitants. Ils étaient sauvages, se détestaient, vivaient de chasse au piège : à peu près dans l’état physique et moral des hommes de la préhistoire. Les orties dévoraient autour d’eux les maisons abandonnées. Leur condition était sans espoir. Il ne s’agissait pour eux que d’attendre la mort : situation qui ne prédispose guère aux vertus.

Tout était changé. L’air lui-même. Au lieu des bourrasques sèches et brutales qui m’accueillaient jadis, soufflait une brise souple chargée d’odeurs. Un bruit semblable à celui de l’eau venait des hauteurs : c’était celui du vent dans les forêts. Enfin, chose plus étonnante, j’entendis le vrai bruit de l’eau coulant dans un bassin. Je vis qu’on avait fait une fontaine, qu’elle était abondante et, ce qui me toucha le plus, on avait planté près d’elle un tilleul qui pouvait déjà avoir dans les quatre ans, déjà gras, symbole incontestable d’une résurrection.
Par ailleurs, Vergons portait les traces d’un travail pour l’entreprise duquel l’espoir était nécessaire. L’espoir était donc revenu. On avait déblayé les ruines, abattu les pans de murs délabrés et reconstruit cinq maisons. Le hameau comptait désormais vingt-huit habitants dont quatre jeunes ménages. Les maisons neuves, crépies de frais, étaient entourées de jardins potagers où poussaient, mélangés mais alignés, les légumes et les fleurs, les choux et les rosiers, les poireaux et les gueules-de-loup, les céleris et les anémones. C’était désormais un endroit où l’on avait envie d’habiter.
À partir de là, je fis mon chemin à pied. La guerre dont nous sortions à peine n’avait pas permis l’épanouissement complet de la vie, mais Lazare était hors du tombeau. Sur les flans abaissés de la montagne, je voyais de petits champs d’orge et de seigle en herbe ; au fond des étroites vallées, quelques prairies verdissaient.

Il n’a fallu que les huit ans qui nous séparent de cette époque pour que tout le pays resplendisse de santé et d’aisance. Sur l’emplacement des ruines que j’avais vues en 1913, s’élèvent maintenant des fermes propres, bien crépies, qui dénotent une vie heureuse et confortable. Les vieilles sources, alimentées par les pluies et les neiges que retiennent les forêts, se sont remises à couler. On en a canalisé les eaux. À côté de chaque ferme, dans des bosquets d’érables, les bassins des fontaines débordent sur des tapis de menthes fraîches.
Les villages se sont reconstruits peu à peu. Une population venue des plaines où la terre se vend cher s’est fixée dans le pays, y apportant de la jeunesse, du mouvement, de l’esprit d’aventure. On rencontre dans les chemins des hommes et des femmes bien nourris, des garçons et des filles qui savent rire et ont repris goût aux fêtes campagnardes.
Si on compte l’ancienne population, méconnaissable depuis qu’elle vit avec douceur et les nouveaux venus, plus de dix mille personnes doivent leur bonheur à Elzéard Bouffier.

Quand je réfléchis qu’un homme seul, réduit à ses simples ressources physiques et morales, a suffi pour faire surgir du désert ce pays de Canaan, je trouve que, malgré tout, la condition humaine est admirable. Mais, quand je fais le compte de tout ce qu’il a fallu de constance dans la grandeur d’âme et d’acharnement dans la générosité pour obtenir ce résultat, je suis pris d’un immense respect pour ce vieux paysan sans culture qui a su mener à bien cette œuvre digne de Dieu.

Elzéard Bouffier est mort paisiblement en 1947 à l’hospice de Banon.


mardi 24 juillet 2012

Une souris bien gourmande

Prenez le temps d'une infusion avec la souris verte, elle vous racontera une petite histoire.


Au banquet du village une soupe fut servie. 
Tout autour de l'assiette s'attroupaient des souris. 

Toutes bien penchées, au-dessus,
pour ne pas salir leurs habits. 

Mais quand l'assiette fut presque à sec, 
c'est le plus gourmand qui sauta dedans, 
sans ces vêtements. 

Il les retrouva en sortant, mais hélas, 
ils étaient maintenant trop petits :)




jeudi 5 juillet 2012

Haïku


Forêt étendue,
De feuilles, de fleurs, de glands,
Tu te joues du temps.

Longue et frêle esquif,
Au maître de chaire courbé,
Navigue toujours.

Construction de tronc,
Fier, gigantesque et utile,
Le temps t’est compté.

En tombant sur eux,
Les larmes de la vanité,
Glissent ou alors sèchent.








Poésie Libre

Tous ces gens qui se promènent,
Tout ce monde avide de jouissance,
Toutes ces industries produisant sans raison,
Ont-ils encore des yeux pour voir la nature
Belle, vivante et meurtrie,
Ou vivent-ils déjà les paupières closes ?


mardi 26 juin 2012

Le temps qui passe

Le loup, la biche et le temps qui passe.

Il était une fois un loup, aux longues dents
Et l’appétit qui va avec, sans oublier
L’insouciance de son âge et le « temps » pour lui.

Sur les pas d’une biche il rêve d’un festin,
L’emmène vite en sa cuisine et la couvrant
De mots habiles, lui laisse le temps de « croire ».

Il la broie tendrement savourant chaque instant
Et ignore insensible tous ces mots pleurés,
« L’incitant » à se perdre le temps d’une nuit.

Sur les murs les cris d’amour résonnent enfin,
L’emportant dans un monde fait de sentiments,
De troubles, de repentir et de « temps » d’espoir.



Bonne pomme.

Il y a eu une pomme, une pomme parmi tant d’autres, une pomme sortie de la multitude. Une unique pomme ne sollicitant aucune indifférence. La pomme de la connaissance… Et maintenant nous savons ! Nous savons nous vêtir, nous chauffer, nous alimenter, nous occuper… nous nourrir de la vie.

Il y a toujours des pommes, mais à bien y regarder elles restent vide de secret, une chaire claire, fragile, irrégulière qui ne cache rien, rien d’autre qu’une graine qui donnera un arbre et une pomme et une autre… toutes différentes mais semblable à la pomme originelle.

Mais en fait, il n’y a plus de secret, seulement une vie à mener, un goût à trouver, pour au bout du compte jeter le trognon.

mardi 12 juin 2012

"Le vol" sur le blog de Lucille Bisson

Je vous conseille ce blog... Des histoires de mille et un mots (tout au plus :)

Pour écrire un mot...: Des histoires inventées... * Le vol *:
EXTRAITS:
« Mesdames et Messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue à bord du vol 333 d’Air-Évasion à destination du Costa Rica [...]  La durée du vol sera de 9 heures 40 minutes. Nous vous souhaitons un excellent voyage! »
[...]
Je tentais une prière. « Notre Père… » C’était quoi la suite!
[...]
« Qui êtes aux cieux... » Je stoppai sur-le-champ. Ah! non! Pas au ciel! Dans les airs... « Même le Bon Dieu est contre moi aujourd'hui! »
[...]

mardi 22 mai 2012

Il y aura une fille…

Trente minutes de retard ! Le froid était terrible. Il releva son col... De toute manière, il était là pour la journée. Il ne quitterait le Portail Rouge que le cœur déchiré. Il l’avait espéré toute une vie d’étudiant et ce jour à dix heures, il allait s’émerveiller de son apparition. Il se rappelait son regard et son sourire qui l’accompagnait alors qu’il rejoignait la sortie de la boîte de nuit. Trois copains l’attendaient patiemment pourtant las d’une soirée sans flirt.
-        Je t’attendrai, avait-elle dit en lui serrant les mains en guise d’adieu.
-        Ou je t’attendrai, avait-il reprit en les lâchant.

C’est ce qu’il faisait, et ces trente minutes d’attente lui permettaient encore de se remémorer cette rencontre. Ils s’étaient quittés en découvrant une de leurs qualités qui s’accordait à merveille avec leur principal défaut, et c’était lui qui en savourait le parfait mélange.
-        Je suis souvent en retard, avait-elle avoué en fermant les yeux.
-        Cela m’arrive aussi, avait-il répondu en replaçant sa longue mèche bouclée.

Tout c’était passé comme un rêve envoûtant dont il visionnait à plaisir toutes les scènes dans son esprit éveillé. Il lui parlait comme il aimait le faire, en la regardant dans les yeux, presque nez à nez pour mieux l’entendre dans le brouhaha de la discothèque. Il avait apprécié qu’elle ne lui raconte pas sa vie dans le creux de l’oreille. Elle avait simplement soutenu son regard comme par gourmandise. Il revoyait ses lents balbutiements de paupières comme des intentions sensuelles. Il n’avait alors qu’une idée en tête, la revoir. Il n’avait qu’un désir, l’aimer. C’est pour cela qu’il n’avait pas manqué l’occasion de lui proposer ce rendez-vous.
-        Bien sûr… Je vais même chercher lundi mon diplôme officiel d’assistante de direction au lycée du Portail Rouge ! J’y vais avec toutes mes copines pour neuf heures et demi, dix heures, avait-elle dit.
-        Je connais bien. Nous pourrions nous retrouver à dix heures devant le portail, l’avait-il interrogé en approchant sa main de ses cheveux roux.

C’était le rendez-vous le plus rapide qu’il ait pu obtenir dans toute sa vie de don juan. Cette fille était le catalyseur de sa vie, avec elle tout allait s’accélérer. Il avait fait de nombreuses rencontres et avait expérimenté l’amour, ainsi que le sexe. Il avait adulé, chérie, abusé ; il avait été aimé ; il s’était même permis quelques trophées. Mais cette fille était tout autre, son absence lui faisait mal... Il aimait cette sensation de dépendance foudroyante jusqu’alors inconnue. Il aimait cette attente où les souvenirs réchauffaient son cœur et n’offraient aucune prise au froid.
Plongé dans ses rêves, il revoyait son doux visage s’illuminer de rondeur. Une fine lèvre supérieure dévoilait des dents blanches et régulières comme un piano sans bémol. Une autre plus charnue prenait une courbure sensuelle. Toutes deux s’associant en un sourire voluptueux.
Elle avait souri à ces seuls mots :
-        J’espère que vous êtes majeur.

Il jubilait à nouveau de cette réplique qui lui avait valu un sourire et lui avait permis de rebondir sur ce rendez-vous.
Il était à ses côtés. Il se rappelait de l’odeur suave et fraîche de sa peau douce. Il revoyait ses yeux bleus dans lesquels il n’était plus gêné de se baigner. Il venait de l’embrasser… dans ses souvenirs il l’embrassait encore. Le temps n’était plus sa compagne.
Il avait trouvé sa langue douce, dodue et saliveuse de la plus agréable des manières… elle lui communiquait le goût de l’ivresse. Elle avait su être tendre, ferme et joueuse.
Dans cette attente pleine de promesses, ces baisés réchauffés perdaient en réalité. Il ne manquait qu’elle, la belle qu’il avait abordé. Il avait osé s’assoire à ses côtés, dans l’interstice inoccupé de ses amies, et avait attaqué par une longue litani.
-        Je vous regarde depuis que je suis là. Maintenant qu’arrive l’heure de partir, j’ai le courage de vous dire combien vous me plaisez. J’ai adoré vous voir bouger, danser, parler avec vos copines, éconduire les garçons… Je vous ai vu bailler… J’ai été troublé par vos regards. Je m’appelle Thierry, avait-il dit le cœur emballé par tant d’audace. A chacune de ces phrases le visage de la bimbo s’illuminait de plus belle.
-        Enchanté. Vous m’avez provoqué les mêmes tourments. J’ai cru devoir rester tout le week-end avant de vous voir venir. Je suis heureuse que vous me saluiez avant de partir. Je m’appelle Marie-Hélène, avait-elle dit en prenant des couleurs chaudes. A chacun de ces mots l’esprit du bellâtre se troublait de plus belle.
Il avait senti le trouble qui les envahissait et savait qu’il n’aurait pas le temps de provoquer à nouveau cet émoi. Il décida de s’avancer pour forcer le destin. Il approcha ses lèvres sans douter, jusqu’à rencontrer les siennes.

Devant le portail du lycée, il patientait inlassablement. Il dévisageait toutes les silhouettes qui apparaissaient à chaque extrémité de la route ou de la rue piétonne en face de lui. Peu de personne fréquentait ces lieux depuis que la cloche avait sonné le retour en classe.
-        Par où apparaîtras-tu, songea-t-il. Quand viendras-tu chercher ton diplôme ?
S’apprêtant cette fois à revivre chronologiquement sa rencontre, il fut pris d’une vision agréable.
-        Et si elle avait déjà son diplôme en main… Et si elle était déjà là…
Il se retourna, comme guidé par une intuition fébrile. Dans la cour du lycée, il n’y avait personne mis à part une jolie fille engoncée dans une parka beige et tenant en équilibre sur un seul pied. Elle semblait jouer à un-deux-trois-soleil. Elle portait un sourire radieux, ainsi qu’une grande enveloppe brune.
Il hésita un instant et puis il se détourna quelques secondes. Il avait peur qu’elle disparaisse. Quand il regarda à nouveau, elle était toujours là, à peine plus proche, en appui sur l’autre pied. Il n’eut pas la patience de finir le jeu, elle était enfin arrivée, il voulait l’enlacer. Ils se rejoignirent à mi-chemin.

Dans la cour du Portail Rouge deux amoureux discutaient, heureux de dévoiler leur attirance. Ils se promenèrent dans le petit parc qui séparait les bâtiments scolaires de la résidence. Ils se racontèrent le long week-end qui les avait tenu séparés, les films qu’ils avaient aimés, les rêves qu’ils voulaient vivre.
Il connaissait la résidence pour y avoir batifolé. Marie-Hélène la connaissait pour y avoir encore habitée l’année précédente. Ce fut leurs derniers sujets de conversation dans ce parc.

Dans la résidence, deux intrus poussés par une fausse curiosité allaient vérifier l’existence d’une chambre sans serrure. L’ayant trouvée, ils déplacèrent l’unique lit dépouillé pour bloquer la porte.
Ils étaient lucides, responsables et matures.

Ils furent passionnés, fougueux et bruyants.

Ils seront heureux, mariés et parents.

Dans la chambre sans serrure d’où une extase s’échappa, un col était franchi.